8 au 12 septembre
C’est reparti pour un tour. La chute du gouvernement Bayrou procure un sentiment de déjà-vu. N’était le fait que le Premier ministre a mis lui-même sa tête sur le billot cette fois-ci avant même d’avoir essayé de négocier quoi que ce soit, elle n’est guère différente de celle du gouvernement Barnier en décembre de l’année passée.
49-3 ici, 49-1 là : à chaque fois, l’absence de confiance signe la disparition du « fait majoritaire » qui fut, comme le rappelait ici même Bastien François, la divine surprise des débuts de la Ve République et dont les acteurs politiques du moment peinent tant à se passer après 60 années d’une longue et continuelle accoutumance.
Denis Baranger en avait décrypté pour nous les conséquences dès 2023 lors de la réforme des retraites. Le résultat des législatives de 2024 n’a fait qu’accroître les failles qui s’étaient ouvertes en 2022. Désormais, les instruments du parlementarisme rationalisé ne suffiraient plus à assurer la stabilité du gouvernement : on redécouvrait la nature parlementaire de la Ve République que des décennies de présidentialisation avait fait oublier à beaucoup. La fragmentation de la représentation nationale condamnait la France à des gouvernements minoritaires et fragiles faute de volontaires pour construire une coalition parlementaire et la doter d’un programme d’action. De fait, la dissolution intempestive de juin 2024 a précipité notre pays dans ce que nous avions qualifié ici même l’an passé de « crise de régime lente ».
Lente, mais réelle. Car ce nouvel épisode compromet un peu plus la capacité du régime à répondre aux défis de l’heure, à la fois nombreux et existentiels : le pays devient ingouvernable au moment où il aurait besoin précisément d’être gouverné avec légitimité et détermination que ce soit pour amorcer une consolidation budgétaire, pour investir dans l’outil de défense, pour soutenir les politiques climatiques ou pour parler d’une voix forte à Bruxelles afin de tenir tête aux Etats-Unis.
Dans ces circonstances, les forces politiques de gouvernement sauront-elles s’engager dans les négociations et compromis nécessaires à la stabilité du pays ? Pourra-t-on même, le cas échéant et comme nous l’avons préconisé, évoluer vers un mode de scrutin législatif de type proportionnel de manière non seulement à améliorer la fidélité de la représentation à la diversité des sensibilités, mais aussi à dispenser les forces politiques d’alliances pré-électorales contre-nature et à favoriser, comme partout ailleurs en Europe, des coalitions de gouvernement construites sur la base des résultats du scrutin ?
Les trottoirs restent bondés, les parcs toujours animés. Pourtant, si l’on observe de plus près — ou mieux encore, si l’on mesure — la texture de nos interactions a changé.
Aux États-Unis le « gerrymandering », le redécoupage des circonscriptions avant les élections à la Chambre des représentants est une singularité démocratique. Cette pratique, « exploitée par les membres du Congrès pratiquement depuis la fondation de la République », est aujourd'hui promue par Trump, qui milite pour un redécoupage des circonscriptions en faveur du Parti républicain. Mais, prévient Soriano, le président « devrait se méfier des effets de ce charcutage électoral, compte tenu de l'érosion de la coalition qui l'a porté au pouvoir ». Cet article a tout d’abord été publié en espagnol par notre partenaire Agenda Publica
Budget 2026 : rebâtir un climat de confiance entre l’État et les collectivités localesPar Claire Delpech et le Groupe fiscalité de Terra Nova Dénoncées comme excessivement dépensières, les collectivités locales se plaignent de leur perte d’autonomie et de charges croissantes imposées sans compensations suffisantes. Pour dépasser ce dialogue de sourds, une véritable négociation institutionnalisée — avec une perspective sur plusieurs années — doit prendre place entre l’Etat et les acteurs locaux, sur la base de données fiables, transparentes et comparables. |
Politique migratoire : l’exception espagnolePar Tania Racho et Antoine de Clerck Tous les pays européens sont confrontés à une baisse des naissances qui fragilise les équilibres démographiques. Cette évolution a déjà des effets sur le marché du travail, où le recours à la main d’œuvre étrangère se révèle indispensable. Le cas espagnol étudié ici montre que la lucidité politique peut accompagner le réalisme économique. |
La Grande Conversation est la revue intellectuelle et politique de Terra Nova
À travers des publications, des analyses, des articles, nous donnons la parole à la contradiction et à la diversité des points de vue sur les défis du moment.