12 au 16 mai
Communiquant instinctif, peu enclin aux idées générales, Donald Trump gouverne par coups. Il alterne menaces et revirements sans craindre de se contredire. Ses négociations sont souvent impulsives, parfois improvisées, et il abandonne volontiers un dossier dès qu’il cesse de le servir. Autour de lui, cependant, gravitent des idéologues désireux d’imprimer une direction plus structurée à son mandat — au premier rang desquels son vice-président, J. D. Vance, doctrinaire autoritaire et adversaire de l’État fédéral tel qu’il s’est construit depuis le New Deal.
Nouvelle étape du recul annoncé de Trump sur la guerre commerciale, la drastique réduction des droits de douane imposés à la Chine a été annoncée dès l’ouverture des négociations entre les deux pays. Pour un champion auto-proclamé de la transaction, l’art du « deal » se révèle plus laborieux que prévu. Surtout pour un acteur impatient et versatile confronté à la grande patience stratégique d’un Xi Jinping insensible aux contraintes du calendrier électoral. Hormis un accord vite signé avec le Royaume-Uni, ce dossier des droits commerciaux apporte pour le moment peu de bénéfices, même symboliques, au Président américain.
C’est que sa volonté de déclencher la guerre commerciale repose sur un préalable particulièrement fragile : l’idée que le commerce mondial, les alliances traditionnelles et même le rôle international du dollar se sont construits au détriment des intérêts américains. Le rôle international du dollar, considéré depuis longtemps par ses partenaires commerciaux comme un « privilège exorbitant », pourrait être rapidement mis en cause par les décisions incohérentes du Président américain. Opportunité pour les Européens de développer, en réponse, la place de l’euro comme monnaie de réserve et de transaction. Mais les Européens ont encore du chemin à parcourir pour réformer leur marché financier et donner un statut international plus large à l’euro.
À l’inconséquence présidentielle répond, dans l’ombre, un projet plus solide — et plus inquiétant. Le vice-Président, J. D. Vance théorise pour sa part une lecture ultra-nationaliste du pouvoir. Il s’est fait connaître par une autobiographie, dont la véracité est contestée sur plusieurs points, illustrant son ancrage dans l’Amérique populaire. Catholique converti, il s’est risqué sur le terrain théologique pour justifier par une ancienne notion d’ordre de la charité (ordo amoris) le slogan « America first » et les expulsions de sans-papiers. Il est aussi venu faire la leçon à l’Europe au nom de la liberté d’expression et choisi de soutenir des néo-nazis lors des dernières élections allemandes. À la Maison Blanche, à côté d’un président absorbé par ses affaires personnelles, un successeur désigné mène sans retenue une entreprise de transformation autoritaire aux accents fascisants.
En juin, Terra Nova, le think tank Evidences, la ville de Nancy et Res publica, vous invitent à Nancy pour trois jours de débats consacrés à la place de la science au sein de notre démocratie. Au programme de ce Forum Place(s) de la démocratie les 5, 6 et 7 juin : des ateliers participatifs et des tables rondes, en présence notamment d’Aurore Bergé, Patrick Cohen, Agnès Buzyn, Gérald Bronner, Roselyne Bachelot, Étienne Klein, Najat Vallaud-Belkacem, Brune Poirson et bien d’autres… Pour participer, inscrivez-vous ici.
Trump, Musk, Vance : des trois personnalités qui incarnent le nouveau pouvoir à Washington, Vance est sans doute le plus dangereux. Un examen attentif de son parcours et de ses idées permet de cerner sa personnalité autoritaire et sa doctrine fasciste.
Les errements de Trump et la probable poursuite de dérapages budgétaires abiment indiscutablement le crédit financier des États-Unis. Ils interrogent donc sur le statut qu’occupe ce pays comme pourvoyeur d’actifs financiers réputés « sûrs » (safe assets). D’où cette question : l’UE peut-elle gagner en capacité à attirer l’épargne mondiale à la recherche de tels actifs, prenant ainsi des « parts de marché » aux États-Unis ? La hausse de 10% de l’euro face au dollar depuis la prise de pouvoir de Trump annoncerait-elle un tel mouvement ?
Les travailleurs immigrés : avec ou sans eux ?Par Hakim El Karoui et Juba Ihaddaden Pourra-t-on se passer de l’immigration de travail en France dans les années à venir ? Dans un contexte de vieillissement démographique, de pénurie de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs et d’inquiétude sociale alimentée par des discours politiques polarisés, il est essentiel de revenir aux faits et d’évaluer objectivement la contribution de la main-d’œuvre immigrée à l’économie française. |
Enquête sur les représentations à l’égard de l’immigration de travailPar Terra Nova, Sandra Hobian et Lucie Brice Mansencal L’immigration de travail, qu’en pensent les Français ? De nombreuses images négatives sont associées aux arrivées d’étrangers sur notre territoire. Pourtant, les Français savent aussi que les immigrés sont utiles sur la marché du travail. Au-delà des slogans et des préjugés, les représentations apparaissent moins figées quand elles concernent le monde du travail.
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